Sur l’idée de nouveauté en cuisine
Bénédict Beaugé —
Dans Un festin en paroles, Jean-François Revel disait : « La grande cuisine est par vocation une cuisine ouverte, par opposition à la cuisine close fondée sur l’esprit régionaliste. La première est condamnée à inventer, à chercher du neuf, la seconde est tenue au contraire de conserver ce que les siècles ont sécrété pour le meilleur et pour le pire. » Rapide concernant la cuisine « fondée sur l’esprit régionaliste », la phrase souligne, au moins pour la France, cette caractéristique de la grande cuisine, « condamnée à inventer ». Cette vocation, en effet, est avérée dès la naissance de la cuisine française moderne dans le courant du XVIIe siècle, et ne fera que se confirmer dans les siècles suivants, avec des étapes particulièrement marquantes, qu’il s’agisse de l’œuvre de Carême, de la naissance du restaurant, de l’apparition de la critique gastronomique ou du service à la russe, ou encore des différents bouleversements que la cuisine a pu connaître au cours du XXe siècle, des croisades régionalistes à la « nouvelle cuisine » selon Gault et Millau, pour aboutir désormais à une cuisine globalisée.